Réflexion sur l’article de Mr Abdullah Abaakil (Projet constitutionnel et proposition du FCCD)

25.06.2011 |    Kamal Benslimane    | eplume.wordpress.com

Réflexion sur l’article de Mr Abdullah Abaakil

Je me permets de répondre à votre article sur la « Lecture du texte constitutionnel proposé à référendum comparé aux propositions adoptées par le Forum Citoyen pour le Changement Démocratique (FCCD) »

Des fois, j’ai le sentiment que nous engageons un dialogue de sourd, comme si nous ne disposions pas des mêmes textes, alors, je précise que le texte constitutionnel auquel je fais référence est bien celui publié au Bulletin officiel le 17 juin 2011.

Je garde l’ossature de votre lecture pour essayer de répondre aux points qui y sont traités.

De prime abord et s’agissant du volet des droits de l’Homme, il faut éviter de jouer sur les mots ! Si la constitution affirme son attachement aux droits de l’Homme tels qu’ils sont universellement reconnus, c’est une reconnaissance explicite de la charte des Droits de l’Homme. Et d’ailleurs le texte de la constitution est explicite quant à la garantie de la liberté d’opinion politique et de  la criminalisation de la torture, des arrestations arbitraires ou des enlèvements….etc …bref tous les droits figurent dans ce texte, là n’est pas la question,  pourvu qu’ils soient traduits sur le terrain !

A propos de la liberté de conscience qui ne figure pas dans la liste des droits et libertés des citoyennes et citoyens comme vous dites, je pense qu’il s’agit là d’une question, qui à elle seule,  devrait faire d’abord l’objet d’une consultation référendaire. Sinon elle ne peut être considérée que comme une revendication isolée.

Heureusement que l’article 3 stipule l’Islam comme religion d’Etat et que le préambule fait clairement mention d’Etat musulman, car s’il en était autrement, je pense que la majorité du peuple marocain, profondément attaché à la religion, et là j’exclue une partie de l’élite francophone et anglophone, se serait insurgé contre un Etat qui aurait ainsi touché aux principes sacrés de la nation. Le principe de liberté de conscience est par ailleurs garantit « par le libre exercice des cultes » et ce n’est pas parce que je suis personnellement pour le principe que je devrai me sentir en droit de l’imposer à la majorité de la population !

Quant à l’article 19 qui consacre l’égalité des sexes, vous semblez incriminer les « constantes et les lois du Royaume » alors qu’elles ont droit de citer ne serait ce que pour nous maintenir au Maroc, en conformité avec notre contexte et notre environnement immédiat et  non avec celui du Danemak.

Par ailleurs, l’avancée du Maroc par rapport à ce sujet précis avec la réforme de la Moudawana interdit toute spéculation gratuite.

Quant à considérer la constitution comme ne s’imposant pas au Roi, parce qu’il n’y prêterait pas serment comme le ferait le Président américain sur la bible, il faut quand même considérer que Le Maroc à un régime plus ancien et des mécanismes de légitimité spirituelle et temporelle qui lui sont propres et que les marocains ne comptent pas, visiblement, jeter aux orties.

Aussi il est archi faux de considérer que les dahirs royaux ne sont pas soumis à contrôle constitutionnel. A ce sujet, l’article 132 par ex, il stipule que les lois organiques autant que les engagements internationaux peuvent être déférés à la cours constitutionnelle avant leur promulgation par le Roi…au même titre que les autres décideurs. Dans le même sens, l’article 114 prévoit que les décisions individuelles de la Cour Supérieure du Pouvoir Judiciaire sont susceptibles de recours pour excès de pouvoir devant la plus haute juridiction administrative du Royaume.

Vous dites que le terme peuple, seule source de souveraineté suivant les propositions faite par le FCCD, n’est pas mentionné dans le texte, sachant pertinemment que ce texte n’est pas une production des lendemains de la révolution de 1789 et on dirait que vous mettez le peuple hors de la nation, Nation à la quelle la constitution attribue, explicitement la souveraineté ? Et pour être terre à terre, la souveraineté appartient au peuple à partir du moment où celui-ci porte ses représentants au parlement et que le Roi est tenu de respecter ce choix en désignant un chef de gouvernement issu du suffrage universel direct et qu’il nomme à sa demande les membres du gouvernement qui vont présider aux destinées de la nation pendant la durée de leur mandat .Il n’ y a pas d’autres définition de la souveraineté du peuple, dans les contrées les plus démocratiques.

Au sujet de la « Monarchie parlementaire » et la séparation des pouvoirs, vous semblez tenir à imposer cette autre problématique à la majorité du peuple marocain qui semblerait ne pas la partager avec vous. Cette question au même titre que celle de la liberté de conscience, mériterait à elle seule une consultation référendaire. Peut être que dans deux décennies, avec le développement de la participation politique et des pratiques démocratiques, ce référendum pourra voir le jour sans difficultés majeures.

Vous retenez dans ce chapitre, en particulier, l’initiative de la révision constitutionnelle mais vous ne faites aucunement allusion à l’article 172 qui précède et qui établit que l’initiative de la révision constitutionnelle appartient concurremment au Roi au chef du gouvernement, à la chambre des représentants et à la chambre des conseillers.

« Vous parlez de risques quant à l’application et les ambigüités du texte, en signalant qu’à la manière de la constitution de la Vème République française, le domaine de la loi est délimité par l’article 71. Or, ce qui est énuméré en droit est limité, ce qui veut dire que tout ce qui n’est pas du domaine de la loi est de facto du domaine du Dahir (article 42), ou du décret gouvernemental (article 91) ».  Vous poursuivez qu’on peut interpréter cette rédaction comme « une volonté de partage du pouvoir législatif », qui ne relève pas, comme vous l’aviez recommandé, du seul Parlement. A ce sujet outre le passage sous silence de l’article qui établit que la législation et l’édiction de toutes les lois est désormais du ressort exclusif du parlement, vous fermez les yeux sur l’élargissement des domaines de la loi de 30 à 60 domaines.

Par ailleurs, il est évident que le gouvernement peut prendre des décrets qui sont du domaine de la loi, selon des objectifs déterminés, mais l’article 70 précise qu’ils doivent être soumis, au terme du délai fixé par la loi d’habilitation, à la ratification du Parlement.

Autrement dit toutes les initiatives de loi sont in fine présentées au Parlement et en cas de non-conformité à la constitution déférées en conseil constitutionnel.

Enfin en tant que professionnel, vous n’êtes pas sans savoir que la séparation des pouvoirs ne signifie aucunement leur cloisonnement. Sinon on serait en présence d’un système inédit qui n’existe nulle part dans le monde !

Idem pour les deux têtes du pouvoir exécutifs, ce dernier dont le chef du gouvernement, dans le projet de réforme dispose de pouvoirs exécutifs et de nomination inédits.

A propos des recommandations non retenues dans ce texte constitutionnel, vous faites référence à l’article 42 qui limite les Dahirs soumis à contreseing : « Les dahirs, à l’exception de ceux prévus aux articles 41, 44 (2ème alinéa), 47 (1eret 6èmealinéas), 51, 57, 59, 130 (1eralinéa) et 174sont contresignés par le Chef du Gouvernement »

S’agissant de la limitation par l’article 42 des dahirs soumis à contreseing et à l’exception des dahirs religieux, il est tout à fait normal que le ministre ne signe pas sa propre nomination ou sa révocation en cas de sa démission, encore moins qu’il signe la dissolution du parlement en cas de paralysie de ce dernier faute de majorité gouvernementale, par exemple. Je ne vois pas non plus le chef de gouvernement remettre en question la nomination par le CSPJ des magistrats, ou la proclamation de l’Etat d’exception, une fois mise en délibéré, au conseil des ministres et approuvée par le conseil constitutionnel et exercée sans dissolution du Parlement.

Vous prétendez que les affaires étrangères sont du domaine quasi exclusif du Roi (article 55). Et vous allez jusqu’à affirmer qu’en termes de politique étrangère, l’article 55 va jusqu’à attribuer au Roi le pouvoir de signer, mais aussi de ratifier les traités internationaux sans limitation. Vous faites le constat d’une régression par rapport à la constitution de 1962 et vous concluez à une régression qui prive le Gouvernement et le Parlement d’une véritable reddition des comptes en matière d’accord préalable sur la loi de finance. Or à moins que nous ayons deux copie distinctes du projet de réforme, l’article 55 accorde au Roi le pouvoir d’accréditer les ambassadeurs auprès des puissances et organismes internationaux et signe et ratifie les traités à l’exception des traités de paix ou d’union, ou ceux relatifs à la délimitation des frontières, les traités de commerce ou ceux engageant les finances de l’Etat ou dont l’application nécessite des mesures législatives, ainsi que les traités relatifs aux droits et libertés individuelles ou collectives… ceux là ne peuvent être ratifiés par le Roi qu’après avoir été préalablement approuvés par la Loi ! C’est clair c’est net et sans ambiguïté ! L’article en question poursuit que le Roi peut soumettre au Parlement tout autre traité avant sa ratification. Quant à la loi de finance c’est le parlement qui la vote en vertu de l’article 75.

Au sujet de l’indépendance de la justice, l’argumentation est trop faible dans la mesure où elle ne prend pas en compte les dispositions édictées par les constitutions les plus démocratiques en Europe. Si votre argumentation devait être retenue, on conclurait à la non indépendance de la justice en France, à titre d’exemple.  La présidence par le Roi du CSPJ et son approbation de la nomination, par la Cour, des magistrats, ainsi que son autonomie administrative et financière et les possibilités de recours contre ses décisions, contredisent les arguments sur la dépendance de cette institution par rapport au Roi.

Enfin quand vous parlez de l’article 130 qui placerait la moitié des membres de la Cour constitutionnelle sous influence du Roi qui « serait l’interprète de l’esprit et de la lettre du texte constitutionnel », vous traitez tous les responsables marocains en mineurs qui n’auraient non seulement aucune personnalité mais aucune déontologie professionnelle non plus, ce qui est assez grave comme affirmation ! Si la situation était ainsi à quel magistrat et à quel responsable entendez-vous confier la gestion des affaires du Maroc ?

Pour terminer, il conviendrait de rappeler que le Maroc pourrait se draper du texte constitutionnel le plus révolutionnaire qui soit au Monde, il n’aurait aucune importance si la population et les élites se confinent dans le boycott et la défection politique.

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3 commentaires pour Réflexion sur l’article de Mr Abdullah Abaakil (Projet constitutionnel et proposition du FCCD)

  1. ... dit :

    Réponse de Abdulah Abaakil via Facebook:

    • Désolé de briser tout le travail de réfutation dans l’ensemble, je répondrai aux éléments juridiques à part, mais mon texte consistait, comme l’indique le titre, en une comparaison entre le texte proposé à référendum et les propositions du FCCD. Le choix du terme « Etat musulman », par exemple, s’il te convient, n’est pas celui que le FCCD a retenu, parlant de « pays musulman ». Que le peuple marocain s’offusque de cette définition est ton opinion, mais elle n’est pas partagée par tous, et je te laisse le soin d’expliquer à JAWI aussi qu’ils se retrouvent propulsés dans l’élite « francophone et anglophone ». 🙂

    • ‎ »vous semblez incriminer les « constantes et les lois du Royaume » ». C’est faux. Je me contente de noter une contradiction flagrante avec le principe de hiérarchie des lois proclamé dans le préambule du même texte constitutionnel. Cette hiérarchie suppose que les lois nationales se conforment aux traités internationaux ratifiés, et non l’inverse.

    • ‎ »Aussi il est archi faux de considérer que les dahirs royaux ne sont pas soumis à contrôle constitutionnel. » Tout à fait, en théorie. Seulement, pour un rejet en recours pour inconstitutionnalité, je suppose qu’il faille obtenir la majorité des votes de la Cour constitutionnelle. Or, qui en nomme la moitié des membres? Je suis prêt à retirer cette ignoble accusation si la loi organique à venir prévoit qu’il suffit du quart des voix pour un rejet pour inconstitutionnalité.

    • ‎ » Au sujet de la « Monarchie parlementaire » et la séparation des pouvoirs, vous semblez tenir à imposer cette autre problématique à la majorité du peuple marocain ». Le FCCD a demandé, comme d’autres organisations, ces principes. Je ne tente pas d’imposer quoi que ce soit, mais je rappelle que le texte constitutionnel, « publié au Bulletin officiel le 17 juin 2011 », se réclame et de la monarchie parlementaire (avec du rab), et de la séparation des pouvoirs. Je me contente de parler de fraude manifeste dans la confiscation de ces termes.

    • Les termes « souveraineté nationale » et « souveraineté populaire » sont suffisamment clairs dans leurs définitions politiques. Si ton choix se porte sur la première, tu voudras bien m’autoriser, et le FCCD avec, à choisir la seconde. La présence du mot « peuple » n’est pas suffisante pour définir une démocratie, mais elle est indispensable à toute démocratie. Je te laisse le soin de me citer une de ces « contrées les plus démocratiques » dans lesquelles le peuple n’est pas mentionné une seule fois.

    • Pour ce qui est du domaine de la loi, si tu te satisfais d’une augmentation quantitative (de 30 à 60), sans examen qualitatif, soit. Il n’en reste pas moins que le pouvoir de légiférer est incontestablement partagé et n’est pas seule propriété du Parlement élu.

    • Je n’ai pas le souvenir d’avoir prôné le cloisonnement des trois pouvoirs, qui se trouvent dans ce texte, en réalité, particulièrement cloisonnés. Je souligne simplement que le Roi cumule encore ces trois pouvoirs.

    • « Si votre argumentation devait être retenue, on conclurait à la non indépendance de la justice en France, à titre d’exemple ». Effectivement, il y a un vrai souci d’indépendance en France, que tu sembles compter, à tort, dans « les constitutions les plus démocratiques en Europe ». Je ne compte pas parmi les victimes acculturées du prisme français. Néanmoins, il faut noter que les défauts de la Vème République française sont amortis par l’élection du chef de l’Etat au suffrage universel, mais aussi et surtout une alternance à cette fonction. Ce n’est pas le cas des monarchies.

    • ‎ »C’est clair c’est net et sans ambiguïté ! » pour l’article 55. D’accord, c’est clair et net, mais non sans ambiguïté. Je te renvoie au même souci de contrôle constitutionnel. La régression par rapport à la constitution de 1962 provient de cette ambiguïté.

  2. kamal benslimane dit :

    J’ai hésité avant de me résoudre à vous répondre… mais je le fais pour ne pas vous laisser sur votre faim assi Abdullah !
    A propos de la liberté de conscience et de la nouvelle prise de position de «Justice et Bienfaisance », autour de la question de l’Etat civil et de l’alternance au pouvoir, même si je n’ai pas parlé de cette association précisément, il apparaît que la volonté de ré islamiser la société marocaine ne serait nullement en contradiction avec cette nouvelle orientation prise à la lumière de la dynamique actuelle qui impose de raffermir les liens avec les sensibilités de gauche dans le M20F…néanmoins à ce propos, je partage l’idée de Mr Tozy selon laquelle « le M20F exploserait en plein vol si on lui demandait de formuler des alternatives concrètes »…Mais cette évolution positive de « Justice et bienfaisance » est la bienvenue puisqu’elle s’apparente à un pas qui devrait augurer de son intégration dans le champ politique, à condition qu’elle se conforme aux dispositions constitutionnelles.
    Quant à la question de la hiérarchie des normes, tous les ordres juridiques dans le monde font en sorte qu’aucune clause d’un traité ou d’un engagement international, ne puisse être contraire à la constitution qui est la norme suprême et je pense que même si il y avait une autorité supranationale, elle se garderait bien de toucher à ce principe ! Aussi à partir du moment où le texte constitutionnel fait référence à la déclaration des droits de l’Homme et à tous les droits fondamentaux qui figurent dans le préambule, je pense que « l’inversion de la hiérarchie » n’aurait pas d’incidences graves au niveau des principes énoncés.

    Par ailleurs, en parlant de la soumission du Roi aux dispositions de la constitution et en utilisant de gros mots comme la « fraude manifeste sur la séparation des pouvoirs », je constate simplement que, au même titre que tous les analystes, vous saluez bien les avancées de ce projet constitutionnel tant au niveau des libertés fondamentales qu’au niveau des mécanismes institutionnels, et que vous êtes même en attente de l’adoption des lois organiques précisant leur fonctionnement, mais cela ne vous empêche pas de faire campagne pour le boycott en jetant le bébé avec l’eau du bain.
    Aussi à la question de la monarchie parlementaire et du pouvoir du parlement, je vous renvoie au lien suivant sur ma réponse à Mr Sassi.
    S’agissant de la distinction entre les souverainetés populaire et nationale, je pense qu’on se perdrait si on devait rentrer dans les considérations de Rousseau et de Sieyès. Mais, s’il est vrai que la souveraineté populaire ne fut concrétisée en France que dans la Constitution de 1793, l’article 3 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 énonce que « Le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la Nation. Nul corps, nul individu ne peut exercer d’autorité qui n’en émane expressément». Donc, la souveraineté populaire existerait là où les citoyens adoptent des lois lors d’assemblées. Historiquement, on a retrouvé ce système dans de petits Etats (cantons suisses) et il a également connu quelques tentatives d’application dans l’ex-URSS de Lénine, avec le système des Soviets régionaux et locaux. Peut être aussi, dans les congrès populaires de base de la Jamahiriya libyenne….mais dans tous les cas, les systèmes actuels de représentation interdisent de parler de souveraineté populaire dans sa version initiale…. Par contre, il est communément admis que là où il y a suffrage universel direct et jusqu’à nouvel ordre, il y a expression de la souveraineté populaire !
    Enfin sur la constitution de 1962, j’ai bien revisité les textes mais je n’ai rien trouvé qui puisse être comparé au projet constitutionnel actuel. Le texte et le contexte étaient différents et les enjeux l’étaient tout autant, même si leur présentation en tant que renouvellement de pacte et la réaction du boycott présentent quelques similarités. Une continuité révélatrice d’un système de dispositions durables et transposables intériorisées sûrement de manière inconsciente !
    Par contre, je partage ton ambition de faire en sorte que notre pays puisse dépasser en terme de pratiques démocratiques les pays précurseurs en la matière, l’acculturation à laquelle vous avez fait référence est une réalité ne serait ce que dans notre débat mené en langue française et nos approches et maniement des concepts et qui témoignent d’une césure flagrante avec notre pensée, Il s’agit juste d’éviter de réagir selon le postulat que toutes les sociétés se découpent selon les mêmes tronçons, en se dépouillant de leur originalité !
    cdlt

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